Publié le 8 Novembre 2020

Secret 33

 

La bande de Caissargues commençait à se réduire, mais nous sommes restés un petit groupe. Maintenant on a des contacts en ville et un point de chute, le 18 rue Général Perrier.
Cet appartement aura une grande importance plus tard, mais c’est une autre histoire.

 

Pour l’instant nous avons accès à toutes sortes de cames, et on ne s’est pas privé de tester un peu tout ça. Les soirées finissaient souvent à l’aube et je dormais souvent sur place. On ne faisait plus trop de dégâts dans le village, plutôt du tapage nocturne et quelques visites dans les vergers ou jardin potager. L’herbe et le shit nous ouvraient l’appétit. On prenait des fous rires chaque fois qu’on se faisait courser. Les moments les plus cocasses, je les ai vécus pendant les rares fois ou j’accompagnais B, RC et BC à la messe du samedi, souvent complètement défoncés, et hilares, ils officiaient comme enfants de chœur et chaque fois qu’ils croisaient ma bouille réjouie au premier rang le fou rire repartait de plus belle. Le curé les punissait en les enfermant dans la sacristie, ils en profitaient pour siffler le vin de messe. Ça n’allait jamais trop loin, et tout ça se réglait en allant à confesse, sauf moi.

 

Les plus grands commençaient à avoir des motos, pas de grosses motos, mais des Flandria, Malaguti, Gitane testi et autres, chacun l’équipait du dernier carburateur sorti ou du meilleur Kit pour augmenter la puissance.

 

Je me contentais d’une bleue, qui bien des fois m’a ramené à Caissargues je ne sais pas comment, vu le peu de souvenirs que j’avais le lendemain du trajet. La mobylette me donnait une grande autonomie. Je transportais de tout dans une cantine posée entre mes jambes et le guidon. Je précise, car c’est important cette mobylette était à moi, ce qui soulageait celle de mon frère.
 

À suivre

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Publié le 7 Novembre 2020

Secret 32

L’organisation paramilitaire des camps d’été ne nous convenait pas vraiment. On avait le salut aux couleurs le matin, des activités proches de l’entraînement militaire. Rapidement on a constitué une patrouille à part avec l’accord de certains aînés. Nous avions rectifié l’uniforme en ne gardant que le foulard et les badges. Ce qui ne plaisait pas aux disciples de Baden Powel. Donc on compensait en construisant des structures collectives, abris, tables, douches, ça nous donnait une certaine liberté. Je me souviens que j’avais obtenu les brevets de couturier, troubadour, secouriste et peut-être la possibilité de faire ma promesse.

Il y avait une patrouille particulière, les Rachoumgalas, leur cri de ralliement était : « Les rachoumgalas toujours plus gla gla gla » ils n’étaient pas comme nous, débraillés, et sales, leur campement toujours en bordel. On ne les voyait pas trop participer aux activités. Une fois de plus je me sentais plus proche d’eux leur autonomie me plaisait, malheureusement, encore louveteau je n’avais pas accès au clan des grands.

Le temps des éclaireurs a été pour moi, une période où j’ai commencé à comprendre que le moule de l’éducation nationale n’était pas fait pour moi. J’ai compris que l’échec scolaire n’était pas un échec, mais une porte ouverte à tout plein d’aventures et de découvertes, pas toujours dans les clous, mais bien plus excitantes. Quand on bricole sa vie, il faut développer un sens de l’improvisation et avoir toujours la curiosité en éveil.

À suivre

 

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Publié le 3 Novembre 2020

Revenons un peu en arrière, ne cherchez pas trop de logique dans la chronologie, car je puise au fur et à mesure dans ma mémoire défaillante.
Les beaux arts, j’en parlerai plus tard.

 

Pour le moment il y a l’entrée aux éclaireurs. J’étais encore le plus jeune. Je fais l’impasse sur mon passage chez les louveteaux, pas grand-chose à dire si ce n’est que je ne me souviens pas de grand chose. Mais chez les grands, j’ai continué à nourrir mon insatiable curiosité. Le premier camp Grésy sur Isère, ils m’ont bombardé maire du camp. Chaque patrouille (hé oui c’était un peu paramilitaire) construisait une table, un foyer, un vaisselier, et un wc (pas toilette sèche, mais au Grésil).

Pour inaugurer ce village il y avait bien sûr un maire. On me promenait sur un chariot ceint d’une écharpe tricolore et torse nu. À cette époque-là, j’étais un peu fier, mais plus tard je les aurais tous envoyés chier. Dans le vrai village situé à proximité de camp on pouvait acheter du vin, de l’Apremont, vin de Savoie sucré et doucereux. Les grands en prenaient toujours, j’ai bien sûr essayé, ma première cuite et une gueule de bois gigantesque.
Nous partions en excursion dans la montagne. Un jour pour prendre un soi-disant raccourci, PB, PS, et moi on a dévalé un éboulis. Arrivés en bas, cul-de-sac. Il faut remonter. On s’aperçoit vite qu’il y a des nids de serpents un peu partout, des vipères ou du moins ça y ressemblait. La montée s’est faite avec d’infinies précautions. Le raccourci nous a permis d’arriver quatre heures après les autres.

 

Nous faisions aussi des explorations survie . On partait d’un lieu assez éloigné du camp et le but était de se débrouiller pour manger dormir et se déplacer pour rejoindre le camp. C’est là que j’ai commencé à voler dans les magasins et dans les fermes. Au début pour bouffer et ensuite pour l’adrénaline. Les explorations terminaient souvent chez les gendarmes. On revenait d’une manière ou d’une autre toujours au camp.

Le bon modèle, parole de scout.

 

Ça durait un mois et demi, ça n’avait rien à voir avec les colonies de vacances. On avait beaucoup plus de libertés. En fait on avait une paix royale. Je pense que les plus grands qui nous encadraient n’étaient pas plus responsables que nous. Et en profitaient pour faire la fête. Bon, quelques-uns étaient les gardiens du temple et perpétuaient l’héritage de Baden Powel en nous faisant miroiter la promesse que tout éclaireur doit faire :

 

Je promets sur mon honneur de faire tous mes efforts pour :
Servir mon pays et l’amitié entre les hommes,
Rendre service en toute occasion,
Vivre notre loi.

 

Et voilà le texte de loi :
 

un(e) éclaireur (euse)
Est franc (Che) et loyal(e).
Rend service.
Est
un(e) ami(e) pour tous et un frère (une sœur) pour tous les autres scouts.
Est
courtois(e), écoute les autres et respecte leurs convictions.
Aime et protège la nature et la vie.
S
ait obéir et agir en équipe.
Est
toujours de bonne humeur.
Ne fai
t rien à moitié, est économe et respectueux (se) du bien d’autrui.
Est
propre, maîtrise ses paroles et ses actes.
N’a qu’une parole.

 

À suivre

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Publié le 2 Novembre 2020

Cet article est reposté depuis Le blog d'Éric Babaud.

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Publié le 2 Novembre 2020

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Publié le 1 Novembre 2020

Secret 30

Je suis arrivé en troisième . Entre-temps le collège a déménagé dans un préfabriqué à quelques pas du lycée Duhoda, puis est devenu le collège Capouchiné. Souvent j’ai profité d’être en ville pour sécher les cours et aller la voir, elle m’attirait depuis longtemps. Les caves Sainte Eugénie dans la rue du même nom accueillaientt quelques Nîmois qui sont devenus un peu ma nouvelle bande. Il y avait des peintres, des artisans, des musiciens, et d’autres qui regardaient le temps passer. Un joueur de harpe, un guitariste qui jouait et chantait que du Hendrix, le peintre en lettre qui décorait les vitrines à chaque fête, tous pas mal plus âgés que moi.

Mansour Bekkada (le peintre en lettre)

J’ai retrouvé aussi ceux de la bande de Caissargues qui avaient investi un appartement au 18 de la rue Général Perrier. La librairie Notre Temps peuplée de jeunes et vieux militants, où l’on pouvait lire des ouvrages qui parlaient de luttes et d’émancipation.

Au collège de Capouchiné, j’avais un professeur d’espagnol qui connaissait bien mon père, ils étaient au parti socialiste ensemble, il le tenait au courant de mes absences. J’étais coincé, et je ne pouvais pas aller en ville comme je voulais. Je suis passé en conseil de discipline pour avoir mangé du chewingom alors que c’était interdit. Ils m’ont viré et je me suis retrouvé au collège de Bouillargues pour faire une deuxième troisième. Loin de la ville, mon père n’y avait aucun informateur. Les années collège ont fait éclater notre bande Caissarguaise, j’ai perdu de vue B qui faisait ses études au lycée agricole de Rhodillan.

 

Je dois être un des rares collégiens à avoir passé le BEPC en trois ans. Je voulais rentrer à l’école des beaux arts, Rinèti y était et ça me faisait envie, on y apprenait, la gravure, la copie de plâtre, le dessin avec modèle vivant, et les bases techniques pour pouvoir développer un travail artistique. Mais mon père exigeait que je passe le BEPC avant. La première troisième, j’ai eu droit au rattrapage, la deuxième il me manquait juste l’épreuve sportive, je ne me suis pas présenté, donc je ne l’ai pas eu. Je précise qu’à mon âge il fallait l’autorisation des parents pour rentrer aux beaux arts. Sinon je ne lui aurais pas demandé son avis. Il a réussi à me faire tripler la troisième et j’ai enfin eu le brevet.

 

À suivre…

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Publié le 30 Octobre 2020

Secret 29

Je n’ai jusqu’à présent pas trop parlé de l’école. Pas grandes choses à dire, car je m’ennuyais souvent, j’avais l’impression d’apprendre plus en dehors que sur les bancs de classes. N’étant pas propre et gaucher en CE1 je faisais tâche. La maîtresse madame D, m’avait un jour dit : « tu finiras ferrailleur » j’ai presque réussit. En CM2 le maître, monsieur B, voulait me faire redoubler, je suis passé de justesse en sixième. Je suis rentré au collège Dhuoda qui faisait lycée et classes techniques après le bac. Que des grands, un bâtiment immense avec des couloirs gris et interminables.

Le section technique

Mon frère était en troisième. Je le cherchais, car je pensais qu’il me protégerait. Pensez donc quand il m’a vue il m’a écrasé la tronche sur une barre de hand-ball. Je lui en avais fait voir à Caissargues et en colonie. Mais chaque fois que quelqu’un d’autre me cherchait des noises, il était là, lui seul avait le droit de me taper dessus. Les cours étaient dispensés par des fonctionnaires en fin de course, quelques un tout de même nous donnait le désir d’apprendre, et dans ces matières là nous n’étions pas si mauvais. Je me souviens d’un cours d’art plastique avec monsieur B, peintre qui exposait à la Galerie Jules Salle qui nous avait fait travailler sur le logo Lip au moment de la lutte des ouvriers, l’administration l’avait convoqué et voulait le sanctionner, on ne fait pas de politique dans un établissement scolaire, j’ai trouvé ça injuste, et j’ai rassemblé la classe pour créer un groupe de défense de ce professeur, on a réussi à le réhabiliter et la sanction n’est pas tombée.

J’ai donc redoublé la sixième et on m’a mis dans une voie de garage, pour l’ensemble de mon œuvre. La sixième de transition, imaginez une voie de garage, au bout il y a un buttoir, soit on s’arrête au buttoir soit on fonce et on explose le buttoir. C’est ce que j’ai essayé de faire.

À suivre…

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Publié le 27 Octobre 2020

Secret 28

Sur les hauteurs du village en allant vers Garons, un nouveau lotissement sortait de terre. Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas fait de conneries dans les chantiers, les lotissements du bas été tous finis. Ils ont construit des « Chalandonettes »

des maisons construites avec des matériaux bon marché pour petit budget, les cloisons sont en carton. Notre grand jeu consistait à prendre de l’élan et à passer à travers les murs. Les plus forts arrivaient à passer à travers deux murs dans la même course. Comme dans les dessins animés, on essayait de faire des trous avec la forme de nos corps.
Ça nous a amusés beaucoup.

C’était des habitations bon marché, la population qui est venue habiter là venait de la ZUP de Nîmes. Les gamins ont rapidement intégré la bande, ils avaient le profil, souvent des familles nombreuses et pas très riches. Ils avaient beaucoup de libertés. Dans le village la bande était repérée, certains avaient eu la visite de la police. Je pense qu’ils avaient déjà eu affaire aux flics de la ZUP de Nîmes. Les plus jeunes, dont je faisais partie, ont un peu décroché.

J’ai senti à ce moment-là que ça pouvait dégénérer.
On s’est donc retrouvés à quatre ou cinq à continuer nos activités diverses plus ou moins interdites.

On passaient de longues soirées à faire le bœuf, fumer des pétards et à se raconter des histoires d’aventures. Je commençais à maîtriser la grille de Blues en mi.

 

J’avais toujours envie, d’aller voir plus loin

 

À suivre

 

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Publié le 26 Octobre 2020

Secret 27

 

Un jour j’ai prêté la mobylette de mon frère à B et JT ils avaient un rendez-vous à Bouillargues.

Les voilà partis pendant toute la journée, je pense qu’ils n’ont pas sucé que des cordes de pluie, en rentrant ils ont roulé dans les caniveaux de Bouillargues. Grands caniveaux pour évacuer les eaux de ruissellement des costières, assez profonds et larges, on pouvait y circuler facilement. Mais devant chaque porte, il y avait une passerelle en travers pour traverser. Les deux compères en ont percuté une. Résultat, fourche tordue et quelques bleus. Et la mobylette est rentrée encore une fois cassée. La suite s’est passée entre mon frère et moi, je vous laisse imaginer comment.

Nous étions bien dégourdis pour réparer les mobs. Elles étaient rapidement remises en route. Pour repartir de plus belle. Nous bricolions les moteurs, en agrandissant les pipes d’admission, en montant des carburateurs plus gros, en diminuant la hauteur des pistons et en limant les culasses.

Tout ça pour gagner un kilomètre-heure de plus et perdre énormément d’espérance de vie des moteurs. En haut de la rue Puech du Teil à Nîmes il y avait la casse Arpinon, notre fournisseur de pièces en tout genre. Devant son mobil-home bureau il y avait un coffre fort, qui nous a fait fantasmer longtemps ? Mais dans son bureau il y avait aussi un fusil de chasse et un bonhomme pas sympathique du tout. Le coffre fort est resté un fantasme.

Une autre utilisation des mobylettes consistait à faire le tour du parc le plus vite possible en tournant toujours dans le même sens un pied à terre. Pour protéger le pied, on fixait un morceau de pneu avec du fil de fer, et toujours à fond nous faisions des courses, jusqu’à la panne d’essence.
 


Mon frère a investi dans une chaîne et un cadenas, fini pour moi, je n’avais plus de mobylette.

À suivre

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Publié le 25 Octobre 2020

Secret 27

 

Le 25 octobre, c’est depuis longtemps mon anniversaire. Ma grand-mère paternelle Jeanne,( je l’aimais bien elle aussi) demandait à mon grand-père quelques sous, et on partait en bus à Nîmes, rue de la Vierge chez Bensoussan négociant en jouets. J’en choisissais un. Après nous allions chez Courtois, pâtisserie salon de thé place du marché. Une pâtisserie couverte de miroirs et d’or, les glaces étaient face à face, nos reflets se multipliaient à l’infini. C’était un palais magique. Jeanne commandait un baba au rhum et on lui laissait la bouteille de rhum sur la table, elle aimait bien boire un coup à sa santé. Ensuite on partait pour rejoindre l’arrêt de bus, nous donnions une pièce au clochard de la rue Régale, suivi d’un arrêt au palace (café des juges et avocats) elle buvait un demi. Nous rentrions à Caissargues en fin d’après midi.

Jeanne fille d’un photographe allemand (disparu mystérieusement) son magasin se trouvait boulevard amiral Courbet. Elle est sa sœur ont été séparées et placées dans des familles d’accueil. Jeanne est bien tombée, sa sœur beaucoup moins bien. Jeanne, communiste convaincue, partageait le peu qu’elle possédait et a continué quand la prospérité lui souriait.

Je me souviens qu'elle disait à mon frère (qui était grand pour son âge et maigre comme un clou :

« Ho petit pierre, où tu vas venir ? »

Elle m’avait appris à dire fleur à la place de merde, ça a le même nombre de lettres.

 

 

À suivre

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Publié le 23 Octobre 2020

Ça y est ! j’ai une mobylette, bon, elle est à mon mon frère, mais je l’emprunte de temps en temps.

Une bleue toute « neuve » avec suspensions arrière. C’est avec B le plus souvent que je chevauche cette merveille. Un jour sur le chemin entre la route d’Arles et Caissargues, je suis sur le porte-bagage et B à la conduite, panne d'essence, B secoue la mobylette pour faire descendre les dernières gouttes. C’est la chute B saute et reste debout et moi je me ramasse mon coude racle le bitume. J’ai une belle plaie on voit l’os, la mobylette a le guidon tordu. Je rentre à la maison ma mère en voyant ce trou, tombe dans les pommes, je vais voir mon père qui est à l’imprimerie à côté, je lui dis :

– Maman est tombée dans les pommes

ni une ni deux je me prends une engueulade

– tu lui as fait quoi encore

– rien

je lui montre mon coude il change de registre et hop aux urgences. Entre temps ma mère était revenue parmi nous. Je me suis fait copieusement engueuler par mon frère. (je n’ai pas pris de coup de poing vu l’état de mon coude).

Après quelques points de suture et le rappel tétanos, j’ai pendant quelque temps laissé tranquille la mobylette de mon frère. J’ai encore aujourd’hui une belle cicatrice.

 

La mobylette ne restera pas tranquille très longtemps.

 

À suivre

 

 

 

 

 

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Publié le 22 Octobre 2020

Secret 24

 

Nous donnions des surnoms facilement, de Babar à la vapeur, Rinéti, les sœurs Cuba, Bazou. Mon surnom c’etait Kaco. Il y en a un qui avait une origine particulière, Billicoque, celui qui le portait était notre souffre-douleur. Certains parents nous disaient de nous méfier de lui, et de sa famille. Aucun de nous ne connaissait l’intérieur de sa maison. Un jour, leur fille s’est fait mordre par le chien des voisins, ils ont porté plainte (ça ne se faisait que rarement, à cette époque les problèmes se réglaient directement). Il en fallait pas plus pour que tout le quartier se méfie de cette famille.

M nous disait souvent qu’il avait de la famille dans la pègre aux états unis, il n’en fallait pas plus, pour qu’on le surnomme Bilicoque (Billy Cook bandit notoire et malsain aux États unis dans les années cinquante)

Billy Cook

M nous racontait aussi qu’il parlait régulièrement à la dame qui vivait dans les trous des rives du Vistre, une légende Caissarguaise. On lui a fait toutes sortes de misères, il faisait quand même partie de la bande. Il avait cinq ans de plus que moi.

Dans notre école il y avait des élèves multiredoublants, bien plus grands que nous, en particulier R un géant en taille et en âge, nous passions toutes les récréations à essayer de l’attraper et de le mettre par terre. Comme une nuée de moineaux, tous les petits lui grimpaient dessus. Il s’amusait autant que nous et en redemandait. Je crois que l’on n’est jamais parvenu à le déséquilibrer.

J'avais un livre qui me faisait penser à lui.

Offert par l'auteur pour mes 9 ans

 

 

https://cagalopedanslatetedemanon.wordpress.com/2017/04/07/mais-qui-etait-billy-cook/

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Publié le 18 Octobre 2020

Secret 23

 

Nous avions une bonne connaissance des ressources de notre royaume. Les bons cerisiers, les meilleures figues, le champ où l’on pouvait tranquillement voler les melons, les pèches, les pommes, et savions où trouver les pieds de raisins de table (le plus souvent du Muscat) que l’on dénichait au milieu des vignes à vin. On ne mangeait pas tout sur celles-là, nous supposions que ça servait à récompenser les vendangeurs.

 

Sur la route du mas de Nages, le grand champ était bordé de cerisiers centenaires, avec des cerises inoubliables. Le propriétaire EB, un des plus riches paysans du village, alcoolique et vilain, portant une casquette noire collée par la crasse à son crâne, sur son lit de mort, demanda à son fermier de couper tous les cerisiers. « Je ne veux pas qu’on en profite après moi » aurait-il dit. Tous les cerisiers ont été abattus.

Nous avions des aptitudes au bricolage, pour nous fabriquer toutes sortes d’outils de jet, la flèche polynésienne était la plus efficace, le lance-pierre rentrait dans une poche, l’arc le plus puissant ; avec toutes ces armes nous n’avons jamais tué quoi que ce soi. Certains d’entre nous, comme leur papa, partaient à la chasse. La passée aux grives le soir, les lièvres et les poules d’eau. Ceux qui avaient des relations chassaient en Camargue dans des chasses privées le canard colvert. J’ai toujours eu le sentiment que la Camargue était un immense terrain privé, où seuls les courtisans des grands manadiers et autres riziculteurs avaient leurs entrées.

J’ai tiré au fusil de chasse, mais sur des pancartes de propriétés privées, ou en l’air.

Nous étions adaptés à notre territoire, toutes les bonnes planques, les passages couverts,les observatoires, et les bons endroits pour chaparder des fruits et légumes n’avaient aucun secret pour nous.
 

À suivre…

 

 

 

 


 


 

 

 

 

 

 

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Publié le 16 Octobre 2020

Secret 22

 

Il y avait JCL musicien, qui jouait de plusieurs instruments, saxophones, violon, mandoline, flûte, accordéon. C’était notre griot, de huit ans mon aîné, nous faisions avec lui des voyages immobiles et musicaux. Je ne l’ai jamais perdue de vus on à même travaillé ensemble, c’était un ballochard du samedi soir dans l’orchestre de Joe Allan. Une vision de la vie sereine et lumineuse, une grande sagesse spirituelle. J’ai beaucoup appris avec lui. Il faisait partie des grands de Caissargues qui je suppose faisaient pas mal de conneries, aussi. Parmi eux, il y avait ma grande sœur. C’était la bande des grands.

 

Autour du Vistre nous y allions souvent pour cacher nos activités illégales, ou interdites, la fumette et l’alcool. Nous avions laissé tomber le radeau, on en avait toujours envie, mais l ’accès aux poubelles de l’imprimerie était fermé. Il faut dire qu’on y mettait un sacré bordel. Sans les matériaux plus de radeaux. Mais plus tard l’imprimerie me servira encore. Comme dans tous les groupes, nous avions un souffre-douleur. Un de l’avenue de Camargue, dans nos jeux, soit il était exclu, soit on lui donnait le mauvais rôle. C’est quelqu’un qui me fascinait et m’inquiétait aussi.

Une vieille famille de Caissargues, mais pas intégrée vraiment. Je reviendrai sur son rôle plus tard.

 

On avait un jeu à la con, nous nous mettions en cercle avec un de nous au centre les yeux fermés un de nous lui donnait un coup de poing dans l’épaule, il devait deviner qui avait donné le coup. S’il ne trouvait pas, il restait au centre. Vous voyez l’arnaque ?

 

Le jeu breton aussi, on jetait un caillou ou une pigne de pins très haut en l’air il ne fallait pas regarder et attendre quelle retombe, celui qui les prenait sur le crane avait perdu.

 

Et le jeu du bidon, regroupés au centre d’un terrain nous envoyons un bidon d’huile le plus loin possible aprés avoir tiré un de nous, au sort. Il devait aller chercher le bidon et le ramener au centre, pendant ce temps on se cachait. Le but était de venir taper dans le bidon sans qu’il nous découvre.

 

Pendant un certain temps, on à plus trop fait de conneries, car il y avait eu des plaintes et la gendarmerie de Rodhillan était venue constater les dégâts.

 

À suivre …

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Publié le 15 Octobre 2020

Secret 21

 

Les arènes de Caissargues servaient de terrain d’entraînement à l’école taurine de Nîmes. Nous y allions souvent, pour regarder les entraînements de jeunes apprentis pas encore toreros. Il y avait là Nimeño, et quelques autres. Il s’entraînait des journées entières et souvent sous le soleil d’été. Imaginez il faisait le tour des arènes en sautant de part et d’autre de la talenquaire, puis en équilibre sur elle. Il répétait inlassablement les passes et tous les gestes d’une Faèna. Et pour se rafraîchir buvait à la régalade, avec, la aussi, une grande maîtrise du geste. Pour finir, il se couvrait de sa cape au centre des arènes sous le soleil d’été, et restait là un long moment.

 

Il y avait aussi des guitaristes flamenco, dans le style Paco de Lucia. Pendant des heures nous les écoutions, en silence. Parfois, on prenait une cape ou une muleta pour se mesurer au toro à roulette, je me suis rendu compte là de la taille de ces bestiaux, et du danger de les affronter. La bande se divisait en deux : ceux qui descendaient dans l’arène et les autres. Je faisais partie des autres. J’ai assisté gamin à des courses camarguaises prestigieuses. La finale du trident d’or, le trophée des as. J’avais même ma place à la tribune présidentielle.

 

Chinito et Christian à Caissargues

Nous avions aussi des cours de secourisme, prodigués par un militaire à la retraite, il y avait toute la bande. Un jour nous avons appris à sangler un « blessé » sur le brancard. B d’un côté et moi de l’autre, l’instructeur nous dit : « si vous le retournez il devrait tenir » Imaginez un gaucher et un droitier, on le retourne, mais pas dans le même sens je lâche et le pauvre les bras liés, percute le sol en faisant un bruit sourd. Le formateur s’affole ne sachant plus que faire, il panique. Nous retournons le brancard, le pauvre avait une énorme bosse sur le front, nous l’avons dessanglé et ramené à sa maison. Les cours de « secourisme » se sont terminés là.

 

À suivre …

 

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Publié le 12 Octobre 2020

Secret 20

André Larguier

Mon père instructeur pilote dans l’armée de l’air (voilà pourquoi je suis né à Marrakech) avait encore des contacts avec la base de Garons. Et on avait droit au coiffeur militaire, visite à domicile. Coupe en brosse réglementaire, et friction du cuir chevelu avec une sorte de gomme molle qui permettaient de faire tenir la brosse en l’air. Comme je l’ai déjà dit, j’ai toujours pensé que mon père n’était pas vraiment descendu de son avion, il avait l’air heureux là-haut. Et quand il en parlait, c’était des récits passionnants, qui lui donnaient beaucoup de joie. Combien de fois il racontait ses séances de voltige, les fois où ils volaient face à face, en jouant à celui qui dégagera le dernier. Celui qui gagnait toujours fermait les yeux. Un jour à Marrakech au cours d’un vol, il parle tout haut : « Je me demande, si je ne vais pas vendre ma mobylette » la radio n’était pas coupée et toute la base a entendu ça. À l’atterrissage, il y avait foule pour lui acheter la bécane. Il est redescendu sur la terre des hommes et son bonheur est resté là-haut.

Base de Marrakeh ( camp Mangin )

 

À Caissargues, il dirigeait une imprimerie, et se passionnait pour la langue provençale et le Félibrige.
Nous allions souvent dans la manade, Fabre Malhian. Je n’étais pas bien grand et le Baïle-gardian Pierre me faisait visiter la Camargue. Souvent au crépuscule, le moment où les animaux sortent. Il voyait tout et je ne distinguais pas grand-chose. C’était magique, nous parlions à voix basse en nous cachant dans les anganes. Je vous jure que plusieurs fois je l’ai vu, la bête du Vacares. À la féria de Caissargues, on m’habillait en gardian pour participer au défilé et à la messe dominicale en provencal. Nous assistions à toutes sortes de rituels notamment le bistournage, et le marquage des taureaux. Mon père avait un droit de passage dans la propriété Bec. Après avoir passé une barrière fermée, nous suivions une piste qui menait à une pinède bordant la plage. Une plage rien que pour nous ; nous étions les rois.

 

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Publié le 10 Octobre 2020

Secret 19

Nous y voilà, après les pétards à mèches, nous avons trouvé je ne sais où, la recette d’un explosif plus puissant. À base de sucre et d’un autre produit qui n’est plus en vente libre. Ma mère nous voyant passer avec tout ce sucre nous demande ce que l’on va en faire. « C’est pour faire de la confiture ». La recette est simple, une part de sucre, une part de l’autre produit. On tasse ce mélange dans un tube d’acier, en prenant garde de ne pas faire d’étincelles. Le tube est refermé dans un étauet à l’autre bout on pose une mèche. L’explosion est beaucoup plus puissante qu’avec les pétards.

À la station d’épuration, on a fait des gerbes de boues qui sont montées très haut. Nous avons fait sauter d’autres choses pas très avouables, même s’il y a prescription. En ne tassant pas le mélange dans le tube, ça n’explosait plus, mais ça faisait une flamme très puissante. Des tentatives de fabrication de fusées se sont succédées, en s’améliorant chaque fois, pour atteindre des hauteurs remarquables. Nous avons pris conscience du danger de cet explosif, on a fini notre stock, et stoppé cet épisode.

Le village s’agrandit considérablement. D’autres, plus ou moins jeunes, nous rejoignent. Ce ne sont plus des copains d’enfance, ils viennent d’ailleurs, avec de nouvelles activités. C’est le début de l’élargissement de notre territoire. Bouillargues sera le premier village où l’on a trouvé des copains pas trop loin. Nous y allions souvent, à pied. On découvrait ce village comme si c’était un autre monde. Je me souviens surtout d’un immense bistrot, avec une cour recouverte de canisses. Le patron, un ancien Caissarguais, nous connaissait presque tous. Surtout les enfants d’élus à la mairie de Caissargues, c’était mon cas. Une liberté toute relative et surveillée. Je me suis toujours posé la question s' il n’informait pas nos parents de toutes nos activités. Mais en dehors du village, nous nous tenions peinards. Du moins pour le moment.

Sur Caissargues, parmi les nouveaux arrivants, ils y en avaient trois qui étaient de sacrés musiciens. Le groupe commençait à avoir un répertoire fourni. Il y circulait aussi d’autres produits à fumer que la clématite et le sureau.

À suivre

 

 

 

 

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Rédigé par jacques

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Publié le 6 Octobre 2020

Le Vistre nous ne l’avions pas abandonné. Nos terrains de jeux de plus en plus urbanisés, il ne restait qu’une cachette sûre et vu l’odeur du fleuve, nous étions tranquilles. La cabane reconstruite sur une rive cachée avait tout le confort, et de la lumière pour le soir. La bande rétrécie, le restant, restera soudé jusqu’à l’entrée dans la vie active. Guitares, bongos, flûtes en tout genre, de longues heures à faire le bœuf. Souvent très tard, les parents n’étaient vraiment pas inquiets, ou alors ils s’en foutaient pourvu qu’on ne les emmerde pas ? Cette liberté nous convenait parfaitement.

 

Au centre du village il y avait encore, quelques champs et d’immenses rangées de cyprès, assez larges et solides pour faire un passage de l’un à l’autre. Nous y avons passé des journées entières.

Nous pouvions cheminer tout autour des champs, sans être vus des paysans et autres passants.

De ce poste d’observation, nous avions le sentiment d’être invisibles. Tout un tas de signes nous permettait de communiquer sans parler. Mais on ne pouvait pas s’empêcher d’éclater de rire à chaque chute, et se faire repérer.

 

Les cyprès n’étaient pas très loin de la maison de mon grand-père maternel Charles. Lui, je l’aimais bien, un grand sec avec un béret, toujours en bleu de travail. Comme moi, il fouillait dans les poubelles de l’imprimerie, pour utiliser toute sorte de choses pour son potager. Les chutes d’aluminium étaient utilisées comme réflecteur pour les tomates. Son jardin, immense et productif l’occupait la plupart du temps. Le voisin, jardinier aussi, avait une oreille en moins mangée par sa mule. Aussi petit que mon grand-père était grand. Sourds tous les deux, ils avaient de grandes discutions, sûrement des souvenirs de la Grande Guerre. Je les appelais courte patte et patafil. Aux repas de famille, on me mettait souvent à côté de lui, j’aimais bien ça, il me racontait la bataille des Dardanelles et d’autres histoires de soldats. Il avait servi dans la cavalerie. Pour moi c’était merveilleux, c’était les chevaux qui tiraient les pièces d’artillerie, rien à voir avec les héros de westerns. Charles bricolait et quand ça ne marchait pas comme il voulait ; il criait « Ha ! le clown » et l’outil traversait l’atelier. C’était sa plus grosse injure. Il me disait souvent « toi tu as le biais », je pouvais utiliser tous ses outils. Et en plus il possédait une Mobylette bleue avec une remorque.

 

À suivre

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

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