Publié le 28 Décembre 2020

 

Le 18 rue général Perrier était comme ma deuxième maison, je rentrais de temps en temps à Caissargues, mais de moins en moins souvent. J’ai côtoyé toutes sortes de gens au 18, trois de la bande du Vistre et YR et BS deux cousins, guitariste tout les deux, dans des styles très différents. YR jouait et chantait à la perfection le répertoire de Jimi Hendrix à la guitare sèche, BS lui avait plutôt le style John McLaughlin. J’ai passé des heures à les écouter et parfois ils nous apprenaient deux trois accords pour jouer avec eux. On n’avait rien d’autre à faire que faire de la musique et se défoncer.

Quand on avait besoin de faire des courses, on volait tous ce dont on avait besoin. Parfois on cassait une vitrine et on se servait. Tout cela nous paraissait naturel, et pourquoi s’en priver ça marchait à chaque fois. Les dealers qui passaient au 18 nous faisaient confiance et on avait toujours de la marchandise à disposition. J’ai assisté souvent à des disputes de junkies, un jour il y en a un qui est rentré dans l’appartement en nous braquant avec un revolver, surement en manque, il n’a pas résisté longtemps, car on lui a donné une dose. Mais tout ça ne nous affectait pas, car on planait en permanence, sur un nuage.

Il faut quand même savoir qu’il n’y a rien de comparable en intensité de plaisir qu’un flash à l’héroïne (en plus on avait accès à de la blanche non coupée). C’est extraordinaire comme effet malheureusement pour retrouver cette intensité, il en faut chaque fois plus et c’est là le piège on est dépendant physiquement au troisième shoot, pour le plus grand « bonheur » des dealers. Je suis passé à côté de ce manque, un instinct de survie plus fort ? Je ne sais pas.

Il nous passait de drôle d’idées par la tête, un soir avec BC on a pris de l’encre sérigraphique bleu métal et on est allé peindre la Nymphée au centre du jardin de la fontaine, c’était du plus bel effet. Le lendemain on est allé voir notre chef-d’œuvre, les employés municipaux frottaient la statut pour faire disparaître la couleur. YR qui passait par là, éclate de rire en nous voyant, car on avait BC et moi les vêtements tachés d’un magnifique bleu métal.

 

À suivre

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Publié le 27 Décembre 2020

Secret 43

Antifo N.C. fém. provençal

battre l’antifo ou battre l’antiflo  : gagner les champs, s’évader, se dérober à la poursuite, faire sans cesse des escapades. Être toujours par voies et par chemins, rôder, vagabonder au hasard, sans but déterminé.

es esta oubliga de battre l’antiflo : il a été obligé de déguerpir, de s’enfuir.
Es plus eici despièi quàuqui tèms, bat l’antiflo  : il n’est plus ici depuis quelques temps, il est en fuite.

... e ajudon nosto imaginacioun à battre l’antifo. : et aident notre imagination à s’évader.

Aussi :
Nom d’un taureau de Mailhan


 

L’antifo, c’est le nom que me donnait souvent ma mère. Elle avait sûrement deviné que je voulais m’échapper ?



La bande du Vistre a complètement disparu, beaucoup sont partis en ville, d’autres dans des études ailleurs. Quelques-uns ont quitté le village sans donner des nouvelles.
Souvent je passais quelques jours au 18 rue général Perrier, ou habitaient BC RC ML de la bande du Vistre et aussi quelques autres qui venaient et repartaient. C’était tout l’étage qui était occupé, divisé en plusieurs appartements dont un situé entre l’avant-dernier et le dernier étage sur la gauche de l’escalier. Un magnifique escalier large et éclairé par une immense verrière.

 

J’ai squatté cet endroit où circulait tous les toxicomanes de la région, encore une fois j’étais de loin le plus jeune. C’était la liberté totale personne ne se préoccupait du lendemain. Il y avait toujours de quoi se défoncer, j’ai traversé cette période sans connaître les crises de manque, un instinct de survie, ou de la chance, mais je n’ai jamais dépassé le stade où on perd totalement le contrôle. Les junkies sont de véritables bêtes sauvages capables de tout pour une dose. Ils sont seuls au monde dans un univers de seringues de sang de violence. Ils sont manipulateurs et prêts à toutes soumissions pour ne pas manquer de dope. Les dealers on un pouvoir énorme ils fixent les prix, les quantités, souvent ils coupent la poudre avec du lactose ou du talc. Le grand banditisme n’est jamais loin.
Je mesure aujourd’hui quelle chance d’être sorti en bon état de tout ça.
Car l’histoire est loin d’être finie.

 

À suivre

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Publié le 14 Décembre 2020

Secret 41

 

À Caissargues il y avait deux genres de gamins. Ceux qui allaient sur le « bon chemin » et ceux qui aimaient bien l’école buissonnière. Mon père me disait souvent : « ton B… » avec un rictus de dégoût, je voyais là que mes fréquentations ne lui plaisaient pas du tout. À la maison il venait souvent des enfants bien rangés sages et obéissants, avec lesquels je jouais à des jeux de constructions ou de société.
Le dimanche on partait en promenade voir quelques abbayes ou la Camargue, souvent un de ces gamins venait avec nous Et mon père jouait les grands seigneurs en nous invitants au restaurant ou dans une bonne pâtisserie pour le goûter dominical.
Une fois au court d’un voyage en Alsace, sur la route direction Strasbourg, il y avait avec nous JF et tout à coup mon père dit : « Dis-moi JF tu as déjà visité Paris » et hop on bifurque vers la capitale que l’on a visitée de nuit en faisant le tour des grands boulevards. C’était juste un « petit détour » de plusieurs centaines de kilomètres. JF n’avait jamais vu Paris, moi non plus. JF faisait partie des enfants d’amis de mes parents, chefs d’entreprise, avocats, dentiste, cardiologue, et autres conseillers pédagogiques, que du beau linge. J'ai gardé quelques amis parmi eux. Ceux de la bande du Vistre étaient fermier, épicier, menuisier, receveur des postes et mécaniciens. La famille A, industriels, étaient tous les dimanches à la maison, MA et DA venaient souvent avec moi pour rencontrer la bande du Vistre, ils ont vite compris qu’on s’amusait bien.

 

À suivre
 

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Publié le 10 Décembre 2020

Secret 42


La maison familiale était souvent remplie d’invités, certains restaient plus longtemps que d’autres. La pièce principale naguère, salle d’attente de la gare était le lieu de réunion pour la cellule du PS Nîmois, les réunions de francs-maçons, et la salle de rédaction du bulletin municipal.

Une grande partie de mon savoir culturel vient de là en écoutant, assis sur l’escalier qui monte aux chambres, la parole de certains érudits et autres intellectuels présents à table, une bibliothèque vivante. Nous ne comprenions pas tout (je dis nous, car mon frère était avec moi). Le côté interdit « clandestin » nous plaisait beaucoup.
Et les soirées finissaient souvent en chansons paillardes et libations endiablées et libertinages en tout genre. La maison était ouverte pour les amis, je me souviens de MM qui est resté pendant longtemps après un divorce douloureux, et JFCD un pervers qui reluquait les ouvrières de l’imprimerie, qui récitait à longueur de journée des poésies. Un autre dont j’ai oublié le nom, c’était incrusté si longtemps que mon père a fini par le virer, il a envoyé à mon père, une lettre pour le provoquer en duel. La famille F qui débarquaient de Mururoa (militaire qui faisait exploser des bombes dans les atolls prés de Tahiti) eux, ils restaient toutes les vacances d’été, à moitié à poil dans le jardin à faire de grands repas bien arrosés. Ces rencontres avec des personnes remarquables etaient riches en apprentissages et savoir, mais aussi déstabilisantes pour un gamin qui est confronté à des situations d’adultes sans filtre (philtre ?) ni explication.

À suivre

 

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Publié le 4 Décembre 2020

Secret 40
 

Encore avec les éclaireurs, nous sommes partis pour l’Autriche, au mois de juillet dans une station de ski. Le Tyrol véritable carte postale avec des chanteurs de Tyrolienne partout. On a joué les vrais touristes : Châteaux haut perchés, musée BMW à Munich, Stade olympique et même l’endroit où se déroule la fête de la bière, sans la bière ni la fête.
 

Nous campions dans une forêt près d’un torrent de montagne. C’était assez spartiate, mais dans un magnifique paysage, une forêt dense et profonde. Nous nous lavions dans le torrent, glacial et cinglant, les toilettes nous donnaient un bon coup de fouet.

Imst c’est le haut lieu des épreuves de luge et bobsleigh, mais les pistes sans neige c’est d’une inutilité déprimante.


Un camp qui aurait pu être banal si je n’avais,  un matin, après le bain glacé en redescendant au travers de la forêt vu MP dans une très jolie lumière de sous bois. C’est peut-être ça que l’on appelle le coup de foudre, j’ai tout de suite su que c’était elle, la personne avec qui je voulais vivre. Je ne l’ai plus perdue de vue depuis, je n’ai pas osé l’aborder à ce moment-là. J’étais plus dans l’autodestruction que dans la construction d’une vie amoureuse. J’ai attendu quelques années.
À ce moment-là, j’avais déjà le désir (le besoin) de fuir le village, et certaines personnes toxiques.
Des évènements traumatisants et un environnement pas protecteur ne me convenaient pas.
Je suis parti, pas très loin géographiquement, mais avec la nécessité de vivre sans agressions fréquentes. Pour me protéger, ce n’est pas vraiment ce qui est arrivé…

 

À suivre

 

http://jacqueslarguier.net/2020/09/mauvaise-herbe.html

 

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Rédigé par jacques

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Publié le 1 Décembre 2020

Secret 39

Pour ne pas me laisser faire n’importe quoi mon père m’a trouvé un bouleau d’été, chez le peintre en lettre de Caissargues RP un virtuose du pinceau. Il donnait des cours au Collège d’Enseignements techniques de la route de Générac. Mais malheureusement c’était encore quelqu’un qui avait des principes, et dans son atelier il fallait commencer par le bas, c’est-à-dire que je nettoyais les pinceaux et les pots, le vendredi je balayais l’atelier. Comme vacances j’ai connu mieux. Pour vous dégoûter du métier, il n’y a pas mieux. Je soupçonne mon père et mon grand-père de lui avoir demandé de me remettre dans le droit chemin.

Un bonhomme, sec, diabétique, célibataire endurci. Toute la journée il traçait des lettres sur toutes sortes de supports, et quand sa main tremblait il sautait sur un tambour et faisait des roulements, ensuite il grimpait sur une corde lisse jusqu’en haut de son hangar. Calmé il reprenait le pinceau pour tracer des Anglaises et autres lettres aux pleins et déliés élégants et complexes, je passais des heures à le regarder. Et j’ai passé des heures aussi à nettoyer les pinceaux les pots et l’atelier.

J-L L, au volant, et R P, à ses côtés.

Un jour il m’envoie chercher des bouteilles de bières (Valstar) c’est l’été, enfin il devient gentil
j’arrive avec les bières fraiches il les attrape et les verses dans un sceau et me demande de badigeonner la caisse d’un camion (il peignait les logos sur les véhicules des transports Ducros). La bière servait à fixer les poncifs (grande feuille de papier léger ou les lettres était dessinées avec des roulettes dentées, on saupoudrait de blanc de Meudon et les tracés des lettres se retrouvaient transféré sur le camion)

J’ai reçu mon premier salaire

À suivre

 

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Rédigé par jacques

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